Mouthole

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Bande-annonce de « Mouthole »

Vous tombez sur Mouthole sans vraiment savoir à quoi vous attendre. L’écran d’accueil ne rassure pas, son ambiance est étrange et dès les premières minutes, quelque chose vous donne l’impression d’être entré dans un univers qui n’a pas envie de se justifier. C’est une impression rare, car la plupart des jeux cherchent toujours à vous donner des repères, à vous expliquer où vous êtes et pourquoi. Ici, rien de tel. Vous êtes lâché dans un monde qui préfère vous déstabiliser et il faut accepter cette absence de guide pour commencer à en saisir la logique. C’est ce flou constant qui intrigue et qui donne envie d’aller toujours un peu plus loin. Vous sentez que le jeu va vous surprendre, parfois même vous fatiguer, mais vous continuez parce qu’il semble avoir quelque chose de particulier à raconter.

Un monde qui ne s’explique pas facilement

Mouthole
Mouthole

Mouthole n’est pas construit comme une aventure classique où l’on suit une histoire linéaire avec un début, un milieu et une fin. Vous êtes entraîné dans une succession de scènes où chaque élément semble conçu pour brouiller vos repères. Vous découvrez des dialogues qui paraissent absurdes, des séquences où vous devez interagir avec des objets dont vous ignorez le but, des transitions qui vous transportent sans prévenir dans un autre décor. Tout est pensé pour casser le confort habituel des jeux narratifs. Le scénario existe bien, mais il ne se livre jamais en bloc. Il faut fouiller, écouter attentivement et surtout accepter que certaines phrases n’aient pas immédiatement de sens. Avec plus d’un millier de lignes de dialogues, il est évident que le texte est au centre de l’expérience, mais il n’est pas distribué comme une explication claire. Vous devez recoller les morceaux et chaque partie de vos choix a un poids. Le jeu cache 11 fins différentes et les atteindre demande non seulement de relancer l’aventure plusieurs fois, mais aussi de changer vos comportements. Parfois un simple choix apparemment insignifiant débouche sur une conclusion radicalement différente. L’intérêt est justement de voir comment une petite décision influe sur le reste et de constater que même une action qui paraissait anodine avait un rôle. Ce fonctionnement pousse à l’expérimentation. Vous essayez des approches, vous testez des options et vous découvrez que Mouthole veut surtout vous montrer plusieurs visages. À force, on comprend que le jeu n’est pas seulement une histoire étrange, mais une sorte de puzzle global où vos hésitations comptent autant que vos choix.

Cette construction volontairement déstructurée peut paraître frustrante. Pourtant, elle donne une personnalité forte au jeu. L’absence de règles claires vous oblige à chercher, à refaire, à recommencer. Vous êtes parfois perdu, mais c’est aussi dans cette perte que réside l’intérêt. Chaque scène devient une pièce d’un grand tableau que vous n’arrivez pas à voir entièrement et c’est ce mystère qui maintient votre attention. Vous pouvez passer des heures à tenter de comprendre une séquence, à vous demander pourquoi un personnage répète une phrase étrange, ou encore à explorer un espace qui semble vide mais qui finit par livrer un détail important. C’est une expérience qui demande de la patience, car tout est lent, tout est volontairement décousu, mais ce rythme particulier est aussi ce qui le distingue de productions plus classiques.

Entre étrangeté visuelle et sons dérangeants

Mouthole
Mouthole

L’aspect graphique de Mouthole ne cherche jamais à séduire. Vous découvrez des décors bruts, des personnages étranges et des formes qui semblent avoir été dessinées sans souci de cohérence. Pourtant, ce côté rugueux fait partie de l’identité du jeu. Rien n’est poli, rien n’est fait pour plaire à l’œil. Vous passez d’un environnement sombre et étouffant à une zone lumineuse qui n’a rien à voir avec la précédente. Cette succession crée une sensation de malaise mais aussi une fascination, car vous ne savez jamais à quoi vous attendre. Les couleurs changent, les proportions sont bizarres, certains éléments paraissent volontairement disproportionnés. Tout cela donne une impression d’inconfort, mais c’est un inconfort recherché. Vous êtes plongé dans une esthétique qui veut déstabiliser et qui refuse toute harmonie classique.

Le son joue un rôle encore plus marquant. La bande-son ne cherche pas à accompagner en douceur vos pas dans cet univers. Elle vous agresse parfois, vous hypnotise à d’autres moments. Vous entendez des instruments qui ne ressemblent à rien de familier, des bruits mécaniques, des sons saturés. Chaque séquence sonore a pour but de renforcer l’étrangeté. Certains passages vous laissent interagir directement avec des instruments et cette liberté renforce l’idée que Mouthole brouille volontairement les frontières entre récit, expérience interactive et jeu musical. Ce n’est jamais agréable au sens traditionnel, mais c’est justement parce que ce n’est pas agréable que l’atmosphère fonctionne. Vous êtes sur le qui-vive, tendu et cette tension ne vous lâche pas.

En termes de jouabilité, Mouthole se contente de mécanismes simples. Les interactions sont réduites à quelques actions, mais elles prennent du sens par leur enchaînement. Le jeu ne donne jamais toutes les règles, vous obligeant à tester et à deviner. Ce fonctionnement minimaliste s’intègre bien à son approche expérimentale. Vous êtes rarement dans le confort, car rien n’est expliqué, mais ce manque de clarté sert l’objectif du projet. Le sentiment de progression ne passe pas par la maîtrise de commandes compliquées, mais par la compréhension progressive d’un langage étrange qui régit cet univers.

Quand l’expérience se perd dans ses travers

Mouthole
Mouthole

Malgré ses qualités, Mouthole traîne aussi des défauts qu’il est impossible d’ignorer. Le premier problème vient de son rythme. L’absence de structure claire finit par peser. Vous passez parfois de longues minutes à errer sans comprendre si vous avancez ou si vous tournez en rond. Ce flottement constant finit par casser l’envie, car l’impression de stagner devient trop forte. La fragmentation du récit, qui peut séduire au début, se transforme en source de frustration sur la durée. Vous attendez des réponses, mais elles tardent à venir, ou pire, elles n’arrivent jamais.

Les dialogues posent aussi un souci. Ils sont nombreux, parfois trop. La densité du texte fait que l’on décroche par moments, surtout quand certaines répliques semblent se répéter ou s’étirer inutilement. Vous avez le sentiment que le jeu aurait pu être plus percutant avec moins de bavardages. Le problème n’est pas seulement la quantité, mais la manière dont ces dialogues interrompent le rythme. L’enchaînement entre les scènes perd de sa force quand on reste bloqué sur des échanges interminables.

D’un point de vue technique, Mouthole ne respire pas la finition. On remarque des ralentissements, des petits bugs visuels, des transitions abruptes. Rien qui rende l’expérience injouable, mais assez pour rappeler que le jeu n’a pas bénéficié d’un polissage complet. Ces accrocs renforcent le côté expérimental, mais ils nuisent aussi à l’immersion. Enfin, la barrière de la langue reste un point négatif majeur. Le jeu n’est disponible qu’en anglais et vu l’importance des dialogues, il devient difficile de tout suivre si vous ne maîtrisez pas la langue. Cela réduit fortement l’accessibilité et empêche une partie du public d’en profiter pleinement.

Une expérience qui laisse une trace

Mouthole
Mouthole

Mouthole est une œuvre à part. Vous êtes face à un jeu qui ne cherche jamais à plaire facilement et qui ne fait aucun compromis pour être accessible. Ses forces résident dans cette atmosphère étrange, dans la liberté laissée aux choix et dans la manière dont il vous force à expérimenter plutôt qu’à suivre une histoire toute tracée. Ses faiblesses sont réelles et elles freineront sans doute une partie d’entre vous. Le rythme inégal, la densité excessive des dialogues, les approximations techniques et l’absence de traduction en limitent l’impact. Mais malgré tout, Mouthole reste un projet marquant.

Ce n’est pas une aventure que l’on traverse rapidement pour l’oublier ensuite. Même si vous en sortez frustré, vous garderez en tête ses décors bruts, ses sons dérangeants et ce sentiment constant d’avoir exploré quelque chose de différent. L’expérience n’est pas confortable, mais elle ne laisse pas indifférent. Si vous aimez les projets qui prennent des risques, qui vous mettent face à l’inconnu et qui vous poussent à chercher sans tout expliquer, alors Mouthole mérite votre attention.

Merci à l’éditeur de nous avoir fourni le jeu.

Le testeur aime:

  • Atmosphère unique et dérangeante
  • Multiplicité des fins qui incite à relancer l’expérience
  • Direction artistique volontairement brute et marquante
  • Bande-son surprenante qui renforce l’étrangeté
  • Expérimentation constante qui pousse à chercher et à interpréter

Le testeur n'aime pas:

  • Progression confuse et manque de repères
  • Dialogues trop nombreux et parfois répétitifs
  • Rythme inégal qui casse l’immersion
  • Défauts techniques visibles et absence de finition
  • Uniquement en anglais, ce qui limite l’accessibilité
6.8

Honnête

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